Tout a démarré par une flambée des prix de l'acier suite à une brusque reprise de la Chine. Puis c'est le prix du bois qui s'est envolé, les USA s'approvisionnant sur le marché européen pour contrer les taxes canadiennes. Puis les semi-conducteurs sont venus à manquer à leur tour. Depuis plus de 2 mois, la crise s'est étendue à tous les matériaux : acier, aluminium, cuivre, verre, pigments de peinture... révélant à nouveau la fragilité des chaînes d'approvisionnement dès lors qu'un grain de sable s'y immisce. Les fédérations sont mobilisées mais ne peuvent guère négocier plus qu'une revalorisation des devis et un gel des pénalités de retard sur les chantiers publics. Et la crise va durer a averti en avril Agnès Pannier-Runacher, Ministre chargée de l'industrie. Alors que les carnets de commande sont pleins, les fabricants sont à la peine pour trouver les matières premières entrant dans la fabrication de leurs produits. Interrogé en mai, Sébastien Konowrocki, directeur du site Volets Thiebaut qui fabrique des volets bois, alu et PVC (Groupe Burgermeister), témoigne de la tension générée par cette situation qui perdure.
Aucun matériau épargné
"C'est très difficile car absolument tous les matériaux sans exception sont touchés" s'alarme Sébastien Konowrocki. "Le prix du PVC flambe, le bois enregistre une hausse de près de 30%, l'aluminium 40%. Sur l'acier nous ne sommes pas trop touchés car nous en utilisons peu mais les quincailleries fabriquées en alu, acier ou inox sont touchées également, les composants électroniques donc la motorisation aussi, les pigments de peinture... avec des répercussions sur les coûts. Nous devons donc être sur le qui-vive pour toutes les matières car nous sommes fabricants tous matériaux avec une répartition assez diffuse de notre chiffre d'affaires" explique-t-il.
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Prix et délais exorbitants
"Nos clients ont pris des engagements sur des chantiers, avec des prix qui datent et même si nous appliquons des hausses, nous ne pouvons pas tout répercuter. Cette situation joue sur nos marges, celle de nos clients, et rallonge sérieusement les délais pour le client final. Nous pouvons difficilement garantir les marges que nous réalisions jusqu'à présent, et le deuxième semestre va être un exercice périlleux. Allez dans n'importe quel négoce de bois, leur stock de bois est à sec, ils ne sont pas livrés. En alu le prix de la billette s'envole et a atteint presque deux fois son prix d'il y a un an. Certains fournisseurs de PVC mettent des charges temporaires de 10%, ils augmentent leurs tarifs pour six mois en attendant de voir comment se comporte le marché" raconte Sébastien Konowrocki.
Risque de rupture des flux de production
"Actuellement je passe la moitié de mon temps avec le service approvisionnement à trouver les moyens de se couvrir, les opportunités à saisir, les marchés que l'on peut passer... Nous prenons aussi des risques, nous nous engageons sur certains volumes pour certains matériaux. Nous nous devons de le faire pour continuer l'activité et éviter une rupture de flux dans nos productions" explique Sébastien Konowrocki. "Nous anticipons au maximum et nous ne sommes évidemment pas les seuls à essayer de créer un peu de stock mais c'est un cercle vicieux. Certains grands fabricants créent probablement aussi de la pénurie, et les hausses de prix passent plus facilement. Le problème est mondial et notre inquiétude est de ne pouvoir honorer nos commandes au second semestre, de nous retrouver en situation de pénurie totale sur certains matériaux, ce qui bloquerait la chaîne. Si vous êtes en pénurie de colle, même si vous avez l'aluminium, la poudre, l'isolant, vous ne pouvez plus assembler" s'inquiète t-il.